Créé en 2005 et lancé en 2006, le dispositif des Certificats d’Economies d’Energie (CEE ou C2E) constitue l’un des principaux instruments de la politique de maîtrise de la consommation d’énergie.

Son principe ? Les pouvoirs publics imposent à des entreprises, dites « obligées », de réaliser des économies d’énergie. Un objectif pluriannuel est défini et réparti entre elles en fonction de leurs volumes de ventes. En fin de période, ces obligés doivent justifier l’accomplissement de leurs obligations par la détention d’un montant de CEE équivalent à ces obligations, faute de quoi les entreprises sont soumises à des pénalités.

Ce dispositif vient en complément d’autres outils existants, notamment dans le secteur du bâtiment avec la réglementation thermique, les diagnostics de performance énergétique, les crédits d’impôt et autres incitations fiscales.

Un Certificat d’Economie d’Energie (CEE) est une preuve que des travaux conduisant à réaliser des économies d’énergie ont été entrepris. 1 CEE = 1 kWh cumac. CUMAC car il s’agit de l’énergie économisée CUMulée sur la durée de vie conventionnelle d’un équipement, corrigé d’un coefficient d’ACtualisation annuel de 4 %.

I) Les grands principes du dispositif des Certificats d’Economie d’Energie

1) Quels sont les acteurs obligés de réaliser des économies d’énergie ?

Les entreprises qui sont « obligées » de réaliser des opérations d’économies d’énergie par la loi sont les suivantes :

  • les fournisseurs d’énergie : électricité, gaz, fioul domestique, chaleur et froid dont les ventes dépassent un seuil minimum (ex : EDF, Engie, CPCU…) ;
  • les distributeurs de carburant dont les ventes dépassent un certain seuil (compagnies pétrolières et entreprises de la grande distribution telles que Total, BP, SIPLEC…) ;
  • les « délégataires » auxquels les fournisseurs ou distributeurs ont délégué tout ou partie de leur obligation.

2) Quels acteurs peuvent bénéficier du dispositif ?

Les travaux d’économie d’énergie éligibles au dispositif sont réalisés chez des « bénéficiaires » qui peuvent être des collectivités, des bailleurs sociaux, des entreprises ou des particuliers.

En général, les obligés leur proposent une prime financière en amont des travaux à condition que le bénéficiaire lui attribue le dossier complet avec toutes les pièces justificatives.

Par exemple, les collectivités territoriales peuvent obtenir des financements liés aux certificats d’économies d’énergie pour les aider à réaliser des travaux d’isolation sur leur parc immobilier.

3) Quels sont les objectifs du CEE et comment les mesures-t-on ? 

Les objectifs d’économie d’énergie sont fixés sur des périodes triennales. Depuis 2006, les objectifs sont en nette progression à chaque période :

  • 1ère période : 54 TWh cumac entre le 1er juillet 2006 et le 30 juin 2009,
  • 2ème période (2011-2014) : 447 TWh cumac,
  • 3ème période (2015-2017) : 700 TWh cumac ; s’est ajoutée le 1er janvier 2016une obligation spécifique à destination des fournisseurs d’énergie qui doivent soutenir ou permettre le financement de travaux (rénovation, isolation, …) liés à des économies d’énergie auprès des ménages en situation de précarité énergétique (« CEE précarité ») à hauteur de 150 TWh cumac,
  • 4ème période (2018-2021) : 2 133 TWh cumac, dont 533 TWh cumac à réaliser au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique.
  • 5ème période (2022-2025) : 2 400 TWh cumac, dont 600 TWh cumac à réaliser au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique.

Ces objectifs globaux se traduisent en obligation individuelle pour chacun des acteurs obligés en fonction de leurs volumes de ventes aux clients « obligeants », dont l’activité s’inscrit dans la liste suivante :

Code NCE Libellé
E45 Télécommunications et postes
E46 Commerce
E47 Hébergement et restauration
E48 Enseignement
E49 Santé
E50 Services marchands divers (hors santé et enseignement)
E51 Administrations et services non marchands
E52 Ménages

4) Quelles sont les marges de manœuvre pour remplir leurs obligations ?

Les vendeurs ou les distributeurs d’énergie sont libres de choisir les actions à entreprendre pour atteindre leurs obligations. Ils peuvent :

  • réaliser des économies d’énergie sur leurs propres installations ;
  • inciter leurs clients ou non-clients à réaliser des travaux d’économie d’énergie en leur versant une prime ;
  • investir dans des programmes éligibles mis en place par l’Etat et qui octroie une certaine quantité de CEE ;
  • acheter des certificats d’économies d’énergie sur le marché des CEE.

Ces différentes actions conduisant in fine à ce que des CEE soient crédités sur le compte de l’entreprise obligée.

5) Comment est contrôlée l’atteinte des objectifs ?

A la fin de chaque période, les entreprises doivent prouver au ministère de l’Énergie qu’elles ont fait les économies d’énergie qui leur étaient imposées. Enregistrés sur un compte personnel au registre national des certificats d’économie énergie (EMMY), les CEE font office de preuve.

Les entreprises qui auront atteint leur objectif se verront annulés les certificats d’économie d’énergie correspondants (les certificats supplémentaires pourront servir pour les deux prochaines périodes triennales).

Si elles n’ont pas atteint l’objectif d’économies d’énergie exigé à la fin de la période, elles ont deux mois supplémentaires pour arriver à récolter les certificats d’énergie manquants. A la fin de cette période, elles écopent d’une taxe s’élevant à 20 euros par MWh cumac manquant qui devra être versée au Trésor Public.

II) Les opérations d’économie d’énergie éligibles

Des fiches standardisées, fixées par arrêté, listent les opérations éligibles et les montants forfaitaires d’économies d’énergie qu’elles représentent.

A titre d’exemples :

  • un réfrigérateur-congélateur de classe A+++ qui a une durée de vie conventionnelle de 11 ans se verra attribuer 1000 kWh cumac ;
  • 100 TWh cumac (= 100 milliard de kWh cumac) sont équivalents à la consommation énergétique résidentielle d’un million de Français pendant 15 ans.

Toutes les méthodes permettant de réaliser des économies démontrables peuvent rentrer dans le champ du dispositif, mais s’il n’existe pas de fiche standardisée associée, alors il s’agira une opération spécifique avec un dossier plus complexe à monter.

Dans tous les cas, tous les dossiers sont contrôlés par le Pôle National des Certificats d’Economies d’Energie (PNCEE) afin de vérifier l’éligibilité des opérations donnant lieu à la délivrance de CEE.

1) Exemples d’opérations d’économie d’énergie

Les actions peuvent être menées par tous les secteurs d’activité (résidentiel, tertiaire, industriel, agricole, transport, etc.), sur le patrimoine des éligibles ou auprès de tiers qu’ils ont incités à réaliser des économies d’énergie. Les dix opérations les plus fréquemment mises en œuvre sont :

  • Isolation des murs, de combles, de toitures ou d’un réseau d’eau chaude sanitaire ;
  • Système de récupération de chaleur sur un groupe de production de froid ;
  • Chaudière individuelle à haute performance énergétique ;
  • Chaudière collective de type condensation avec contrat assurant le maintien du rendement énergétique de la chaudière ; Chaudière collective à haute performance énergétique
  • Lampe à LED de classe A+ ;
  • Système de variation électronique de vitesse sur un moteur asynchrone ;
  • Primes à l’acquisition de produits moins énergivores.

2) De quoi se compose un dossier CEE ? 

Afin que les CEE soient versés sur le compte du demandeur, il faut faire la preuve que des travaux d’économie d’énergie éligibles ont été réalisés. Pour ce faire, le bénéficiaire des travaux doit fournir un certain nombre d’éléments à l’obligé qui lui finance tout ou partie des travaux via le dispositif :

  • L’offre de prime de l’obligé ou cadre de contribution signé par le bénéficiaire.

  • Le devis des travaux signé par le bénéficiaire.
  • La facture de clôture des travaux.
  • Attestation sur l’Honneur (AH) signé par le bénéficiaire, l’installateur et l’obligé. Celle-ci certifie par les parties-prenantes que l’opération n’a engendré qu’une seule demande de prime.

III) Quels sont les enjeux financiers du dispositif des CEE ?

1) Comment sont financés les CEE ?

On l’a dit, les CEE sont financés par les fournisseurs d’énergie -de gaz et d’électricité comme EDF ou Engie, mais aussi de carburants comme Total ou Leclerc pour leurs stations-service.

Indolores pour les finances publiques, les CEE ont permis de dégonfler le Crédit d’impôt pour la transition énergétique (800 millions d’euros cette année, à 879 millions d’euros prévus).

L’obligation de 2 133 TWh d’économie d’énergie classique et 533 TWh d’économie d’énergie auprès des ménages en situation de précarité représente pour les vendeurs d’énergie environ 19 milliards d’euros sur 4 ans consacrés au soutien sur les travaux d’économies d’énergie (valorisé à 7 €/MWh cumac ce qui est la moyenne des cours depuis le début de cette quatrième période)

2) Qui paye véritablement ?

Le surcoût que représentent les actions menées par les obligés pour se procurer des CEE se répercute naturellement sur la facture du client final.

En général ce surcoût est fléché sur les consommateurs générant une obligation (ménages, tertiaire… activités précisées dans le tableau ci-dessus) bien qu’il n’existe aucune contrainte réglementaire en la matière. De même, ce surcoût est soit intégré dans le prix de fourniture de l’énergie soit explicité en transparence sur une ligne dédiée (de type « complément de prix CEE »).

Si l’on se réfère aux prix publiés sur le registre Emmy il est possible de déterminer une moyenne de ce que cela représente comme prix moyen pour le client final :

Source : Registre Emmy et analyses OMNEGY

Alors que ce coût était modéré (moins de 1 €/MWh) pendant la deuxième et troisième période, l’augmentation brutale des objectifs et donc de l’obligation a conduit à une hausse spectaculaire des prix des CEE, qui représentent maintenant environ 5 €/MWh sur les prix de l’électricité et 3 €/MWh sur les prix du gaz naturel.

D’ailleurs selon plusieurs associations de fournisseurs d’énergie (UFE, Anode, Afieg) et de consommateurs (Afoc, AFC, AFL, CNL), ce coût représente entre 3 % et 4 % des dépenses énergétiques des Français (électricité, gaz, carburants compris), soit entre 100 et 150 € par ménage et par an toutes énergies confondues.

3) Contrôle des coûts

La quatrième période est marquée par une augmentation des prix des CEE due à l’accroissement de la demande de CEE des acteurs obligés associé aux volumes importants de CEE nécessaires pour satisfaire l’obligation de cette période. Ainsi, entre janvier 2017 et octobre 2020, l’indice Emmy relatif aux CEE classiques a évolué de 2,1 €/MWhc à 8,3 €/MWhc et l’indice Emmy relatif aux CEE précarité a évolué de 4,5 €/MWhc à 8,5 €/MWhc (L’indice Emmy étant la meilleure référence de la valeurs des CEE une fois attribués par le PNCEE).

Compte tenu de la part croissante que représente le coût des CEE dans la facture des consommateurs résidentiels, l’ADEME a lancé un bilan approfondi factuel du dispositif notamment sur la troisième période (2015-2018) pour déterminer ses impacts directs et indirects. Les résultats montrent notamment que les volumes CEE ont tendance à baisser, que leur efficacité est affectée par les problèmes de qualité et qu’ils ne génèrent pas systématiquement des économies d’énergie.

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