Dans le cadre d’une mission de conseil en achat d’énergie, il est possible que votre consultant vous propose une offre indexée ARENH. Qu’est-ce qui caractérise ces offres ? Sont-elles compétitives et permettent-elles aux entreprises de faire des économies ? Tour d’horizon de ce mécanisme réglementaire avec OMNEGY.
Mécanisme de l’ARENH : définition et fonctionnement
Pour bien comprendre en quoi consistent les offres indexées ARENH, il faut d’abord revenir à la genèse de ce dispositif réglementaire instauré suite à la libéralisation du marché de l’énergie et à la fin du monopole d’EDF sur le marché français de l’électricité.
Qu’est-ce que le dispositif de l’ARENH ?
Le dispositif de l’ARENH (Accès Régulé à l’Electricité Nucléaire Historique) a été instauré par la loi du 7 décembre 2010 portant sur la nouvelle organisation du marché de l’électricité, dite loi NOME. La fin de ce dispositif est prévue pour 2025.
L’objectif de la mise en place de l’ARENH est exprimé de la façon suivante par la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) : « permettre aux fournisseurs alternatifs d’électricité [apparus suite à la libéralisation du marché de l’électricité] de s’approvisionner en électricité de base dans des conditions économiques équivalentes à celle d’EDF », le fournisseur historique d’électricité.
Très concrètement, l’ARENH permet donc aux fournisseurs alternatifs comme Total Direct Energie ou ENI d’acheter une partie de l’électricité nucléaire produite par EDF grâce à ses centrales construites avant le 8 décembre 2010, à un prix régulé par les pouvoirs publics. Ce dispositif permet donc de favoriser la concurrence entre les différents fournisseurs d’électricité. Le prix de l’ARENH a d’abord été de 40 € / MWh. Il s’élève à 42 € / MWh depuis le 1er janvier 2012.
Les volumes d’ARENH disponibles sont fixés par la Commission de Régulation de l’Energie (CRE). Ils ne peuvent actuellement excéder 100 TWh (térawattheures) par an. Cela correspond à environ 25% de la quantité totale d’électricité produite par les centrales nucléaires d’EDF. Pour bénéficier de l’ARENH, un fournisseur d’énergie doit en faire expressément la demande à la CRE. En vertu de l’arrêté du 17 mai 2011 relatif au calcul des droits à l’ARENH, chaque consommateur d’électricité situé en France métropolitaine permet à son fournisseur d’obtenir des droits à l’ARENH. Ces droits sont calculés ex ante, c’est-à-dire en amont, sur la base des prévisions de consommation fournies par les fournisseurs à la CRE. En cas de sursouscription, les fournisseurs doivent payer un surcoût, lié à deux éléments appelés terme CP1 et terme CP2.
Demandes d’ARENH : quelles évolutions depuis 2011 ?
Les demandes d’ARENH sont directement corrélées au prix de vente de l’électricité sur les marchés de gros. Si le prix de l’électricité est élevé sur les marchés de gros, on constate une hausse des demandes d’ARENH. A l’inverse, s’il est peu coûteux pour les fournisseurs de se procurer de l’électricité sur les marchés de gros, on constate une baisse des demandes d’ARENH.
Les deux volets de ce postulat se reflètent sur l’évolution des demandes d’ARENH depuis sa mise en place :
- Entre 2011 et 2014, entre 60 et 70 TWh d’ARENH ont été livrées par EDF, parallèlement à un prix élevé de l’électricité sur les marchés de gros.
- Entre 2015 et 2016, le volume d’ARENH livré par EDF a considérablement chuté, jusqu’à être nul en 2016. Cela correspond à une baisse considérable du prix de l’électricité sur les marchés de gros ayant incité les fournisseurs d’électricité à délaisser l’ARENH.
- Entre 2017 et 2018, le prix de l’électricité sur les marchés de gros a réaugmenté, ce qui a rendu le dispositif d’ARENH plus attractif aux yeux des fournisseurs d’énergie et donc une hausse immédiate des demandes des
- Enfin, depuis 2019, on assiste à une augmentation quasi-continue du prix de l’électricité sur les marchés de gros. Ils ont ainsi atteint 50 € / MWh en début d’année 2020. Cela a provoqué un pic de demande de l’ARENH, et donc un dépassement du plafond de 100 TWh fixé par la Commission de Régulation de l’Energie. Conformément à l’article 336-3 du Code de l’Energie, cela a donc provoqué un écrêtement du volume d’ARENH cédé par la Commission de Régulation de l’Energie. En 2020, le volume d’ARENH demandé par les fournisseurs étaient ainsi de 147 TWh, ce qui a donné lieu à une réduction des volumes d’ARENH demandés de 32%.
Souscrire à une offre indexée ARENH : une solution avantageuse pour les entreprises ?
L’apparition du dispositif de l’ARENH a poussé les fournisseurs d’électricité à proposer des offres indexées ARENH à leurs clients. On parle également d’offres de fourniture d’électricité avec droits ARENH.
Offre indexée ARENH : définition
Très concrètement, les offres indexées ARENH permettent aux fournisseurs d’énergie d’inclure un taux ARENH dans un contrat de fourniture. Selon l’expérience d’OMNEGY, ce taux est généralement compris entre 60 et 80% de votre consommation totale et varie en fonction de votre profil de consommation et de votre consommation moyenne pendant les heures dites ARENH. Depuis le 15 janvier 2015, ces heures correspondent aux heures creuses d’avril à juin et de septembre à octobre, et donc aux heures comprises entre 1h et 7h en semaine et à l’ensemble des heures les samedis, dimanches et jours fériés. A cela s’ajoutent toutes les heures de juillet et août. Il n’existe pas d’heures ARENH en janvier, février, mars, novembre et décembre. Un coefficient de bouclage d’une valeur de 0,964 est ensuite appliqué, depuis 2015.
Le prix de votre consommation relative à ce taux vous sera alors moins cher que si vous aviez souscrit une offre classique de fourniture d’électricité.
En théorie, souscrire à une offre indexée ARENH peut donc vous permettre donc de réaliser des économies conséquentes par rapport à une offre classique de fourniture d’électricité.
Est-ce avantageux pour une entreprise d’opter pour une offre indexée ARENH ?
Avant de souscrire à une offre indexée ARENH, il est néanmoins nécessaire de garder en tête ce qu’il se passe en cas d’écrêtement des volumes d’ARENH par la CRE.
Votre fournisseur d’électricité sera ainsi obligé d’acheter de l’électricité sur les marchés de gros. Cela sera répercuté sur ses offres de marché et donc sur le prix du kWh (kilowattheure) et se traduira donc automatiquement par une hausse du montant de votre facture d’électricité allant de 2 à 5%.
Si le prix de l’électricité au moment de l’écrêtement est bien supérieur au prix de l’électricité au moment où vous avez souscrit votre contrat, le montant de votre facture d’électricité peut même être plus élevé que si vous aviez opté pour une offre à prix fixe à l’époque. Selon les estimations d’OMNEGY, une offre indexée ARENH ne sera néanmoins moins avantageuse qu’une offre à prix de marché qu’en cas de très forte hausse du prix du MWh sur les marchés de gros combinée à une demande d’ARENH fluctuante par les fournisseurs alternatifs d’électricité.
Avant de souscrire à une offre indexée ARENH, il est essentiel de bien évaluer les risques associés à votre profil de consommation et de bien comparer les offres du marché. OMNEGY peut vous accompagner dans cette démarche et dans l’élaboration d’une stratégie d’achat. Nous vous invitons à contacter nos consultants.
Exemple de l’impact d’un écrêtement de l’ARENH
L’analyse de l’impact d’un écrêtement de 33% de l’ARENH sur le prix du MWh dans le cadre d’un contrat de fourniture d’un professionnel ayant souscrit une offre indexée ARENH est ainsi édifiante. Nous nous plaçons ici dans le cas où le prix de marché est de 50 € / MWh au moment de l’écrêtement.
On peut voir sur le graphique ci-dessus une comparaison entre un contrat à prix de marché et contrat à prix ARENH, avant et après écrêtement de l’ARENH par la CRE.
Avant écrêtement, on constate que l’offre indexée ARENH permet un gain de 5,52 € par MWh consommé par rapport à une offre à prix de marché. Après écrêtement, ce gain diminue car il n’est plus que de 2,59 € par MWh. L’offre indexée ARENH reste néanmoins avantageuse par rapport à un contrat souscrit à prix de marché.
Quelles sont les perspectives d’évolution du dispositif ARENH ?
L’ARENH est un mécanisme réglementaire suscitant aujourd’hui beaucoup de controverses.
Dans son rapport annuel 2018, le Médiateur National de l’Energie plaidait déjà en faveur de sa réforme, en soulignant notamment les trop grandes fluctuations de demandes d’ARENH. On peut ainsi y lire que « l’accès régulé à l’énergie nucléaire historique (ARENH) permet aux fournisseurs alternatifs d’acheter de l’électricité produite par les centrales nucléaires, au prix de 42 €/MWh et en quantité limitée (100 TWh par an). Aujourd’hui, ces fournisseurs jouent sur deux tableaux : ils délaissent l’ARENH quand les prix de gros sont inférieurs à 42 €/MWh et, lorsque ces derniers sont plus élevés, ils demandent à ce que le plafond soit relevé afin de pouvoir en acheter davantage. La réforme de l’ARENH doit être l’occasion de s’interroger sur la mise en place d’une obligation minimum d’approvisionnement par les fournisseurs qui souhaitent y avoir recours. »
En juillet 2020, la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a également publié un rapport en demi-teinte au sujet de l’ARENH, dans lequel elle affirme « qu’une réforme de l’ARENH est souhaitable ». Elle pointe notamment l’impact des écrêtements des dernières années sur les consommateurs, qui pâtissent directement du surcoût qui en résulte. On peut ainsi lire dans le rapport que « les augmentations constatées à la suite des guichets de novembre 2018 et de novembre 2019, l’atteinte du plafond ARENH a entraîné, toutes choses égales par ailleurs, un surcout de 3,3 €/MWh et de 1,4 €/MWh (montants hors-taxes) sur l’approvisionnement en énergie et capacité des TRVE respectivement en 2019 et 2020 par rapport à une situation où les livraisons d’ARENH ne seraient pas soumises à un plafond. »
Dans cette lignée, la Ministre de la Transition Ecologique Barbara Pompili et le Ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance Bruno Le Maire ont également rencontré la Commissaire européenne à la concurrence Margrethe Vestager, afin d’évoquer le projet de réforme de l’ARENH.
Au centre de ces échanges, on trouve notamment la question de la relève du plafond de l’ARENH. Dans son Rapport sur l’atteinte du plafond ARENH pour les années 2019 et 2020 paru le 22 juillet 2020, la Commission de Régulation de l’Energie rappelle que la loi Energie-Climat a réhaussé à 150 TWh le niveau maximal auquel pouvait être fixé le plafond de l’ARENH. Elle rappelle également « la volonté de l’exécutif […] de ne pas rehausser ce plafond avant l’aboutissement des négociations avec la Commission européenne sur la nouvelle régulation du nucléaire ». La CRE souligne également qu’une augmentation à 200 TWh de ce plafond devrait être envisagé d’ici 2025, de même qu’une révision du prix de 42 € / MWh.
Ce prix unique pourrait par ailleurs se transformer en corridor de prix. Il serait donc situé entre un prix plancher et prix plafond. Si la valeur de ces deux seuils est actuellement toujours en cours de discussion, un consensus semble aujourd’hui se dessiner autour d’un écart de 6 euros entre les deux seuils.