Augmentation des tarifs réglementés de vente de l’électricité (TRVE) de 10% au 1er août pour les particuliers et les petites entreprises, annonce de la fin progressive du bouclier tarifaire… le prix de l’électricité est aujourd’hui au cœur du débat public en France. Sa forte augmentation ces derniers mois interroge et inquiète tout autant les ménages que les entreprises. Comment expliquer une telle hausse des prix ? Est-elle justifiée par une hausse du coût réel de production de l’électricité en France ? Réponse avec les experts d’OMNEGY.

Que paie-t-on sur sa facture d’électricité ?

L’objectif de cet article est de mettre en perspective l’augmentation du prix du kilowattheure (kWh) pour les consommateurs finaux et l’évolution coût réel de production de l’électricité. Au préalable, il est essentiel de bien comprendre les différents éléments qui composent une facture d’électricité.

Le montant d’une facture d’électricité varie principalement en fonction du fournisseur et de l’offre choisis

Le prix de l’électricité payé par le consommateur varie en fonction du fournisseur d’électricité qu’il a choisi, de l’offre de fourniture à laquelle il a souscrit et du moment de souscription. Depuis l’ouverture du marché à la concurrence, les particuliers et les professionnels peuvent en effet choisir de se fournir en électricité auprès d’EDF – le fournisseur historique, également producteur d’électricité – ou de fournisseurs alternatifs).

Comment se décompose le coût de l’électricité ?

Quels que soient le fournisseur et l’offre retenus, le prix de l’électricité payé par les entreprises et les particuliers est composé de quatre éléments. Les deux premiers varient en fonction du fournisseur et de l’offre retenus. Il s’agit :  : 

  • du prix de l’abonnement du fournisseur d’électricité. Cette somme permet généralement au fournisseur de couvrir les coûts administratifs de gestion du contrat (service client, facturation…)
  • du prix de la fourniture d’électricité, qui reflète le prix auquel votre fournisseur d’énergie se procure de l’électricité via l’Accès réglementé à l’électricité nucléaire historique (ARENH) et sur le marché de gros (également appelé marché à terme ou SPOT selon la maturité). Il peut également choisir de s’approvisionner directement auprès des producteurs d’énergies renouvelables afin de proposer de l’énergie verte.

Les deux autres composants d’une facture d’électricité sont identiques peu importe le fournisseur et l’offre choisis car réglementés ou légaux :

  • le tarif d’acheminement, payé au travers du TURPE, le Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Electricité ;
  • les diverses taxes et contributions sur l’énergie comme la Contribution au Service Public de l’Electricité (CSPE) ou encore la TVA. 

Pour bien comprendre votre facture d’électricité, ne manquez pas notre article Comprendre le montant de la facture d’électricité des professionnels !

L’augmentation du montant des factures d’électricité ces derniers mois est liée à une augmentation du poids de la fourniture d’électricité. Pour en comprendre les causes, il faut donc s’intéresser au coût de production de l’électricité.

Quelles sont les sources de production d’électricité en France ?

Historiquement, la France est l’un des pays produisant le plus d’électricité par habitant au monde.

Son mix électrique repose principalement sur l’énergie nucléaire. Elle a permis la production de plus de 60% de l’électricité consommée en France en 2023 (RTE, éCO2mix – La production d’électricité par filière). Les énergies renouvelables comme l’énergie hydraulique, l’énergie solaire ou encore l’énergie éolienne occupent une place de moindre importance dans le bouquet électrique français. 

Pour connaître le vrai coût de la production d’électricité en France, il est donc essentiel de s’intéresser avant toute chose au coût de production de l’électricité nucléaire

Quel est le coût réel de production de l’électricité nucléaire en France ?

Le parc de production d’électricité français est exploité à 90% par EDF. TOTAL Energies et ENGIE sont également des producteurs significatifs d’électricité. Pour déterminer le coût réel de production de l’électricité, les experts d’OMNEGY ont donc analysé les données financières du principal producteur d’électricité français. 

Comment calculer le coût réel de production de l’électricité 

Notre objectif est double : 

  • réaliser une estimation du vrai coût de production de l’électricité en France ; 
  • déterminer si l’augmentation du prix du kWh est directement corrélée à une hausse du coût de production de l’électricité

Face à l’absence de données publiques plus précises, notre estimation repose sur les données financières publiées chaque semestre par EDF. Nous avons effectué le calcul simplificateur suivant

Coût de production moyen = (chiffre d’affaires de l’activité de production et de fourniture d’EDF en France – EBIDTA) / (Volume de production + achats nets)

Avant de faire état des conclusions de notre analyse, nous soulignons que le périmètre de cette estimation est restreint à l’électricité produite par EDF. Elle ne tient donc pas compte : 

  • de l’électricité produite par les centrales hydrauliques et à gaz détenues par Engie et TOTAL Energies ;
  • de l’électricité produite par les producteurs d’électricité renouvelable ;
  • de l’électricité générée par des centrales thermiques. 

Notre ambition est d’obtenir un ordre de grandeur du coût de production de l’électricité en France. Notre calcul ne permet pas d’obtenir de données extrêmement précises.

Estimation du vrai coût de production de l’électricité en France par les experts d’OMNEGY

Estimation du vrai coût de production de l’électricité en France par les experts d’OMNEGY

Une hausse du coût de l’électricité essentiellement justifiée par une disponibilité limitée du parc nucléaire français

Le graphique ci-dessus est édifiant à plusieurs titres. 

On constate qu’entre 2013 et 2020, la part correspondant à la fourniture d’électricité des Tarifs Réglementés de Vente de l’électricité et le coût variable d’EDF évoluent de façon parallèle. 

C’est au milieu de l’année 2021 puis en 2022, alors que la crise énergétique entraînée par la guerre en Ukraine est à son apogée, que les deux courbes s’inversent. Bien qu’ayant subi une hausse continue, les TRVE sont alors considérablement inférieurs au coût variable d’EDF, ayant été multiplié par plus de trois. 

Comment expliquer cette hausse du coût variable et cette inversion des courbes ? 

Différentes causes se distinguent nettement : 

  • la principale : l’indisponibilité de nombreux réacteurs nucléaires en raison de maintenances ou de détection d’anomalies. Ces aléas ont entraîné des arrêts inopinés de certaines centrales, comme le rappelle le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires dans l’édition 2022 des Chiffres clés de l’énergie. La disponibilité des installations nucléaires a ainsi été historiquement faible en 2022 : 54%, contre 72% en moyenne entre 2015 et 2019. La production nucléaire française a alors été la plus faible depuis 1988 (RTE, Bilan électrique 2022).
  • une production hydraulique au plus bas niveau depuis 1976. En cause, des conditions climatiques exceptionnelles et une forte sécheresse. On note en 2022 un recul de 20% de la production d’électricité hydraulique par rapport à la moyenne 2014 – 2019 (RTE, Bilan électrique 2022) ; 

Cela a entraîné une utilisation des centrales à gaz, ainsi que des importations en forte hausse en 2022 dans un contexte marqué par une augmentation sans précédent du prix du gaz naturel et des combustibles fossiles (et donc du prix de l’électricité sur les marchés de gros européens). 

La France, importatrice d’électricité pour la première fois depuis 1980

Face à cette indisponibilité du parc nucléaire et des barrages, EDF a été contraint d’importer de l’électricité achetée sur le marché de gros européen pour répondre à la demande en électricité française. C’est un événement inédit depuis 1980. 

Dans un contexte marqué par un emballement du prix du kilowattheure sur le marché SPOT, ces importations ont considérablement dégradé la facture énergétique d’EDF. Alors qu’il se situait autour de 50 euros par mégawattheure (MWh) au début de l’année 2021, il atteint déjà 400 euros par MWh à la fin de cette même année. Il avoisine ensuite les 750 euros par MWh en moyenne journalière à l’été 2022. Pendant toute cette période, la France a été contrainte  d’importer de l’électricité utilisée par les consommateurs finaux  par manque de production sur notre sol. 

La cause de l’augmentation vertigineuse du prix de l’électricité n’est donc pas le coût de production de l’électricité nucléaire en tant que tel. Elle est directement imputable à la nécessité rencontrée par EDF d’acheter de l’électricité sur le marché de gros européen dans ces circonstances hors du commun.

Les données financières et de production d’EDF reflètent parfaitement le caractère exceptionnel de cette crise énergétique inédite. En 2022, année noire pour le Groupe, son EBIDTA pour les activités en France s’élevait ainsi à -23.144 milliards d’euros, après avoir été compris entre 4.5 milliards d’euros et 8 milliards d’euros entre 2013 et 2021. En parallèle, sa production d’électricité nucléaire s’élevait à 279 Térawattheures, soit plus de 80 Térawattheures de moins que l’année précédente. Dans son Bilan électrique 2022, RTE soulignera qu’en 2022, la production nucléaire française n’a représenté que 70% de la moyenne des 20 dernières années. 

Quelles perspectives d’évolution pour le coût de production de l’électricité ? 

Face à ces constats, plusieurs questions se posent immédiatement. A quelle évolution du prix de production de l’électricité faut-il s’attendre ? La hausse des tarifs d’électricité va-t-elle se poursuivre pour les professionnels et les particuliers ? 

Une plus grande disponibilité des moyens de production d’électricité ….

Il est impossible de prédire cette évolution avec certitude. L’évolution du coût réel de production de l’électricité dépendra bien sûr de l’évolution de la disponibilité du parc nucléaire français, des barrages, mais aussi du succès des efforts de sobriété énergétique aujourd’hui impulsés par le gouvernement français.

RTE souligne cependant que “pour l’hiver 2023-2024, la situation est significativement plus favorable que celle initialement envisagée pour l’hiver dernier […]. Le profil de risque se rapproche de celui de l’hiver 2021-2022” (Perspectives pour la sécurité d’approvisionnement en électricité pour l’été, l’automne et l’hiver 2023, juin 2023). Le gestionnaire du réseau de transport d’électricité relève ainsi un certain nombre de signaux positifs : 

  • une meilleure disponibilité des centrales nucléaires ;
  • des stocks hydrauliques situés à des niveaux très satisfaisants ;
  • des stocks gaziers élevés dans l’ensemble des pays de l’Union Européenne ;
  • un développement des infrastructures de production d’électricité renouvelable ;
  • un retour à des niveaux d’exports d’électricité inédits depuis l’automne 2021.

On note également de biens meilleurs résultats pour EDF en 2023, avec un EBITDA remonté à 8,641 milliards d’euros. 

… qui ne suffira pas à empêcher un maintien de la hausse des prix de l’électricité à l’hiver 2023

L’impact de l’évolution du marché de gros sur le prix du kilowattheure d’électricité pour les consommateurs finaux s’effectue en toute logique avec un temps de latence. Un maintien de la hausse du prix final de l’électricité pour la fin de l’année 2023 est alors probable. Compte tenu des différents signaux positifs mentionnés ci-dessus, cette augmentation devrait néanmoins s’adoucir au début de l’année 2024.  

Pour aller plus loin : En 2021, RTE a publié l’étude prospective Futurs énergétiques 2050, en prenant comme base la Stratégie Nationale Bas-carbone du gouvernement français. Le gestionnaire du réseau de transport d’électricité y détaille le coût global du système électrique d’ici 2060 en fonction de 6 scénarios de décarbonation de l’électricité en France.

Ces scénarios reflètent différentes évolutions possibles du bouquet électrique français allant d’une production d’électricité toujours principalement fondée sur l’énergie nucléaire à une production d’électricité intégralement d’origine renouvelable.

Changer de fournisseur d’électricité pour réduire votre facture d’électricité  

Loin d’être sans conséquence, la hausse des prix de l’électricité accroît considérablement le taux d’effort énergétique des particuliers et des entreprises. 

Pour faire baisser le montant de votre facture, pensez à comparer la grille tarifaire des différents fournisseurs d’électricité. Tous ne pratiquent pas le même prix au kilowattheure ! Les fournisseurs alternatifs proposent généralement des tarifs plus intéressants que les fournisseurs historiques. Leurs offres sont également différentes de celles des fournisseurs historiques et comportent bien souvent plus de flexibilités, avec un service performant.

OMNEGY est un cabinet de conseil en énergie. Nous accompagnons les entreprises, industriels et collectivités dans l’optimisation de leurs contrats d’électricité et de gaz et dans la décarbonation de leur consommation d’énergie. Faites appel à nos experts pour réduire vos factures !

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