Lors d’une conférence de presse qui s’est tenue le mercredi 14 septembre 2022, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité RTE a communiqué des précisions sur l’hiver qui s’annonce pour le système électrique français.
Entre message rassurant et appel à la sobriété énergétique, OMNEGY vous fait un résumé des points importants à retenir.
Le contexte particulier de cet hiver
En principe, RTE publie un communiqué de presse à la mi-novembre pour annoncer ce qui attend le pays concernant son système électrique pour l’hiver à venir. Mais cette année est particulière.
Le président du Directoire de RTE, Xavier Piechaczyk a indiqué lors la conférence de presse du 14 septembre 2022 qu’il était nécessaire d’avancer la publication annuelle dès la mi-septembre, en raison des difficultés qui pourraient survenir sur le réseau dès octobre.
Il a également rappelé le contexte inédit de cette année : la crise gazière, à laquelle se sont ajoutés des problèmes de corrosion sur le parc nucléaire ainsi qu’une sécheresse historique rendent la situation délicate pour le réseau. Par ailleurs, malgré la forte hausse du prix de l’électricité sur le marché de gros depuis plus d’un an, le niveau de consommation des Français n’a pas évolué significativement. Ceci s’explique par les mesures prises par le gouvernement dans le cadre du bouclier tarifaire pour protéger le pouvoir d’achat des ménages.
À ce sujet, le gouvernement a pris la parole à la suite de la conférence de presse de RTE pour confirmer que les mesures du bouclier tarifaire seraient prolongées en 2023, sans pour autant pouvoir éviter une hausse des tarifs réglementés de vente (TRV) de gaz et d’électricité de 15%.
Toutefois, l’Etat a fait valoir que la France devait diminuer sa consommation énergétique de l’ordre de 10% d’ici 2024 et devrait publier un plan de sobriété énergétique à ce titre d’ici la fin du mois de septembre 2022.
Dans ce contexte, RTE a souhaité communiquer au plus tôt, pour informer les Français :
- sur la période de vigilance plus précoce cette année ;
- sur les outils permettant de réduire le risque potentiel ;
- sur l’analyse technique et économique de l’équilibre du système pendant l’hiver, afin de rassurer le marché.
Les 3 scénarios envisagés par RTE
Pour travailler sur les perspectives à envisager pour l’hiver, RTE a envisagé trois scénarios :
- Le scénario intermédiaire repose sur une disponibilité du nucléaire de 45 GW en janvier, une consommation d’électricité stable et un fonctionnement correct des interconnexions avec les pays voisins (qui permettent d’importer et d’exporter de l’électricité). Dans cette configuration, le risque pourrait se manifester surtout en cas d’hiver froid et notamment en cas d’absence de vent concomitante.
- Le scénario haut part du principe d’une disponibilité du nucléaire de 40 GW dès le 1er décembre puis 50 GW début janvier. Les risques se trouveraient alors réduits dans l’hypothèse d’un hiver très froid uniquement.
- Le scénario dégradé correspond à la situation dans laquelle les échanges européens seraient difficiles. Dans ce cas, le risque apparaîtrait même en cas de températures normales.
Source : Rapport RTE, septembre 2022
À noter ! Selon RTE, au 12 septembre 2022, la disponibilité du parc nucléaire est de 27 GW, avec 28 réacteurs arrêtés sur 56. Toutefois, EDF a établi un programme précis de redémarrage des réacteurs à l’arrêt, sur une période comprise entre septembre 2022 et février 2023.
Enfin, dernière point important, RTE rappelle que le niveau de consommation est un paramètre primordial, quel que soit le scénario retenu. C’est la raison pour laquelle il est important d’insister sur les mesures de sobriété énergétique.
Les leviers à disposition de RTE pour la passage de l’hiver 2022/2023 sur le système électrique français
RTE indique que même dans le pire des cas (hiver très froid, difficulté d’importation depuis les pays européens), les périodes de difficulté seraient peu nombreuses. Il s’agirait de 20 à 30 jours sur les six prochains mois.
En outre, en aucun cas la tension sur le réseau ne durerait pendant des jours. On parle plutôt de moments délicats au moment des pics de demande, soit entre 8h et 10h et entre 18h et 20h, il n’y aurait pas de problème pendant le week-end ni la nuit.
Dans le pire des cas, il faudrait mettre en place certains leviers pour passer des pics de demande, durant quelques heures, ponctuellement.
Pour cela, le dispositif d’effacement pourra soulager le réseau. Il s’agit des contrats dédiés au particuliers, tels que TEMPO et heures pleines/heures creuses qui incitent les consommateurs à reporter leurs usages en heures creuses. Mais surtout les contrats dédiés aux professionnels qui conduisent à une baisse significative de consommation pendant les pics de consommation, moyennant une contrepartie financière.
La France peut également compter sur les interconnexions qui existent avec ses voisins pour importer de l’électricité lors des pics de consommation. Sur ce point, tout de même, des difficultés pourraient apparaître si nos voisins peinaient à exporter, du fait de la crise énergétique qui les touche parfois davantage comme en Allemagne, pays fortement dépendant du gaz russe.
➡️ Pour en savoir plus retrouvez notre article intitulé : ” L’Europe peut-elle se passer du gaz russe ? “
Enfin, des modifications des usages et la sobriété issue des éco-gestes déclenchés par des signaux de tension Ecowatt bien relayés dans les médias permettraient d’éviter les coupures tournantes.
Ces coupures interviendraient en ultime recours si les éco-gestes ne suffisaient pour éviter le back-out. Il s’agirait de couper l’alimentation en électricité de manière tournantes entres petites zones de consommation pendant moins de deux heures, n’hébergeant pas de consommateurs sensibles
Analyse des prix sur les marchés de gros par RTE
On l’a vu RTE se veut néanmoins rassurant sur la façon dont la France va passer l’hiver. Pour conforter ce discours, l’institution a fait une analyse économique du marché visant à inverser la tendance sur les marchés de gros de l’électricité.
Qu’est-ce qui est demandé aux entreprises cet hiver ?
Baisse des consommations et report des usages en période creuse lorsque cela est possible, deux impératifs auxquels les entreprises vont devoir se plier. En effet, le gestionnaire rappelle que si les prix ont augmenté ces derniers temps, ce qui était tout à fait normal au vu du contexte économique, les prix envisagés sur le marché à terme sont depuis avril décorrelés de la réalité des coûts (notamment des moyens marginaux de types centrales à gaz).
Source : Rapport RTE, septembre 2022
Pour RTE, les prix sont maintenus très élevés sur le marché à terme alors qu’après ses calculs les risques de coupures intégrés dans les prix sont surévalués. Dans son rapport, RTE se veut donc rassurant afin que les acteurs économiques puissent ré-évaluer les risques de manière plus conforme à la réalité.
Pour autant, le gestionnaire de réseau se veut vigilant afin de passer l’hiver sans encombre.
RTE, vigilant pour le passage de l’hiver 2022/2023 pour le système électrique français
Cet hiver, plus que les précédents, particuliers, professionnels et collectivités vont devoir maîtriser leur consommation électrique. C’est la raison pour laquelle les messages en faveur de la sobriété énergétique se multiplient depuis le début de l’été.
D’ailleurs, rappelons que RTE évoquait déjà la nécessité d’entrer dans une phase de sobriété énergétique dans son rapport sur les 6 scénarios sur l’avenir électrique français publié en octobre 2021.
L’institution rappelle en septembre 2022 qu’elle préfère miser sur une « sobriété choisie » plutôt que sur des « coupures subies ».
Pour cela, RTE appelle à utiliser la plateforme EcoWatt, mise en place en partenariat avec l’ADEME. Ce service n’est pas nouveau mais il va devenir indispensable cet hiver.
Il permet en effet d’avoir une vision à J+2 de l’état du réseau électrique. Trois couleurs sont prévues :
- Bleue lorsque la consommation est normale ;
- Orange lorsque le système est tendu et qu’il conviendrait de mettre en place des écogestes ;
- Rouge lorsque le système est très tendu. Les baisses de consommation sont alors inévitables pour éviter les coupures.
Cet outil, accessible au grand public permet donc de se tenir informé de la situation, afin de pouvoir, spontanément, ajuster ses usages en fonction des besoins.
Pour RTE, même s’il n’y a pas d’inquiétude à avoir pour l’hiver, il faut rester vigilant et coopérer collectivement en cas de tension sur le réseau qui se caractérisera par l’envoi d’un signal rouge EcoWatt.
« Nous pouvons écarter une large partie des risques si nous sommes très volontaristes sur la sobriété, ainsi que sur la mobilisation autour du signal EcoWatt rouge lors des pics de consommation, de telle sorte que nous pourrions traverser un hiver, même froid, sans difficulté »
En résumé…
En bref, face à certains messages alarmistes annonçant un black-out cet hiver, RTE met les choses au clair en indiquant que la France ne présente pas un tel risque. Pour autant, il faut rester attentif à l’état du réseau et fournir collectivement des efforts, ponctuellement, à certaines heures pour passer les pics de consommation.